Un produit de la médecine traditionnelle chinoise sera étudié contre le coronavirus
MONTRÉAL — Une substance utilisée depuis des siècles en médecine traditionnelle chinoise fait l’objet d’une nouvelle étude à l’Institut de cardiologie de Montréal pour déterminer le rôle qu’elle pourrait jouer face au coronavirus.
Appelée «chen pi» en médecine traditionnelle chinoise, l’hespéridine est un composant naturel qui se retrouve principalement dans la pelure des agrumes. Des suppléments sont aussi disponibles en vente libre.
«L’étude a comme objectif principal d’évaluer l’effet de l’hespéridine sur les symptômes associés à la COVID, (…) particulièrement la fièvre, la toux, l’essoufflement et la perte de l’odorat, a expliqué le responsable de l’étude, le docteur Jocelyn Dupuis. Mais on prendra aussi en compte des symptômes comme les myalgies, les faiblesses, les symptômes gastrointestinaux, les céphalées, etc.»
Les chercheurs croient que les propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires de l’hespéridine pourraient réduire l’intensité de ces symptômes.
Des études précédentes auraient démontré que l’hespéridine peut réduire le niveau de cytokines impliquées dans la tempête inflammatoire observée dans les cas graves de COVID-19.
L’effet de l’hespéridine sur les symptômes sera évalué à quatre reprises pendant les 14 jours que durera le traitement.
«Les données cliniques montrent que l’hespéridine peut bloquer une enzyme qui est responsable de la réplication du virus SRAS-CoV-1, qui avait causé l’infection en 2003, a dit le docteur Dupuis. Cette enzyme-là est identique chez le SRAS-CoV-2.»
L’hespéridine compterait également parmi les composés les plus à même de bloquer les liaisons de la tristement célèbre protéine de spicule du virus avec son récepteur sur les cellules humaines.
Les chercheurs espèrent donc que les propriétés anti-inflammatoires et antivirales de l’hespéridine permettront potentiellement de réduire la réplication du virus et d’atténuer les symptômes qui sont en partie dus à la réponse inflammatoire.
«C’est un produit fascinant quand on commence à s’intéresser à ça», a dit le docteur Dupuis au sujet de l’hespéridine.
Forme longue
L’hespéridine pourrait aussi éventuellement prévenir la forme longue de la COVID-19, chez ces patients qui ressentent des symptômes — comme la fatigue et la perte de l’odorat — pendant plusieurs mois.
L’Organisation mondiale de la santé a prévenu jeudi que jusqu’à 10 % des patients ressentent toujours des symptômes 12 semaines après leur infection aiguë. L’OMS a mis en garde contre les conséquences sociales, sanitaires et économiques de tels symptômes prolongés.
«La cause est encore mal connue, mais on pense que c’est dû à une réponse immunitaire inappropriée, entre autres au niveau cérébral, a expliqué le docteur Dupuis. De perdre l’odorat pendant quatre mois, ce n’est pas un cadeau pour ceux qui vont le vivre, même si c’est bénin et que ça ne met pas leur vie en danger.»
Les participants à l’étude recevront un gramme d’hespéridine par jour. En comparaison, il faudrait boire de deux à trois litres de jus d’orange chaque jour pour atteindre cette dose, ce qui n’est évidemment pas souhaitable.
Cette étude pourrait ouvrir la porte à d’autres applications thérapeutiques de l’hespéridine. Si le produit se révèle efficace contre le coronavirus, on pourrait ensuite envisager de l’étudier face à d’autres infections virales, comme l’influenza.
«Dans les études animales, l’hespéridine est capable de prévenir les dommages pulmonaires aigus causés par le virus H1N1, par ses effets anti-inflammatoires, a indiqué le docteur Dupuis. Il y a des évidences assez solides au point de vue animal que le produit pourrait être efficace pour prévenir les conséquences graves.»
Les chercheurs souhaitent recruter 216 participants âgés de 18 ans et plus pour cette étude; la moitié d’entre eux recevront l’hespéridine et l’autre moitié un placebo. Les participants devront avoir reçu un diagnostic de COVID-19 au cours des 48 heures précédentes et, pour des raisons logistiques, habiter à tout au plus deux heures de livraison de la grande région de Montréal.
Ceux qui désireraient participer à l’étude peuvent composer le 1-833-917-3369.
Commentaires récents